18.04.2024

Développons le provençal en tant que variété de la langue occitane!

Communiqué · 06.04.2018

Le 29 mars dernier, le président de l’Assemblée Nationale de l’État français a enregistré une proposition de loi « relative à la reconnaissance de la langue provençale en tant que langue de France ». C’est une initiative du député Bernard Reynès.

En tant que mouvements qui défendent le provençal, nous demandons bien entendu une meilleure reconnaissance ! Mais la proposition de loi de Bernard Reynès menace en réalité le provençal parce qu’elle veut le séparer artificiellement de l’occitan. Cela priverait le provençal de lecteurs dans toute l’Occitanie, cela lui enlèverait l’accès à la culture ancienne en graphie classique, cela le mènerait à se dévaloriser et à se réduire au seul folklore.

Cette proposition de loi a le soutien d’une douzaine de députés de différentes régions, dont le Breton Marc Le Fur. Nous croyons que ce sont des députés de bonne foi, mais il nous semble qu’ils ont été manipulés par une officine à la réputation douteuse qui perturbe sans relâche les activités de développement du provençal.

Dans la réalité, le provençal est déjà reconnu comme une partie constitutive de l’occitan ou langue d’oc : telle est la position consensuelle que nous défendons, comme l’ensemble des promoteurs du provençal. Cette réalité est reconnue par:

  • le Ministère de l’éducation et le Ministère de la culture ;
  • les grandes associations provençalistes et occitanistes qui sont sur le terrain ;
  • les scientifiques compétents (linguistes, romanistes, universitaires) ;
  • les plus grands écrivains d’expression provençale comme Frédéric Mistral et Robert Lafont ;
  • le Félibrige, la célèbre association fondée par Frédéric Mistral.

La proposition de loi de Monsieur Reynès prétend que, sur le territoire de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, trois langues distinctes existeraient : le provençal, le niçois et le vivaro-alpin (ou « provençal alpin » ou « gavot »). En réalité, il s’agit de trois modalités régionales de la langue occitane. Et ces trois modalités sont déjà reconnues par les Ministères de l’éducation et de la culture. Nous voulons maintenir cette définition.

Dans la proposition de loi, on affirme que le provençal aurait « son orthographe spécifique » et que Frédéric Mistral serait la référence littéraire qui rendrait légitime la particularité du provençal. En réalité, le provençal a deux orthographes légitimes et déjà reconnues par le Ministère de l’éducation :

  • la graphie classique (illustrée par Robert Lafont),
  • la graphie mistralienne (illustrée par Frédéric Mistral).

Les deux graphies illustrent la littérature en provençal. Nous défendons le droit de les utiliser toutes les deux, dans une perspective unitaire et pluraliste.

Dans la proposition de loi, on affirme que la graphie classique (dite « occitane ») n’aurait « aucune réalité historique » en Provence. Évidemment, c’est un mensonge énorme, puisque la graphie classique illustre la majorité des productions littéraires modernes en provençal depuis les années 1950. Elle est aussi la graphie du provençal médiéval. Il est scandaleux de vouloir supprimer cette dimension fondamentale de notre culture provençale.

Dans la proposition de loi, on dénonce l’unité de la langue occitane qui est qualifiée de « visée réductrice ». C’est là encore un mensonge car le concept de langue occitane affirme très clairement le respect du provençal et des autres dialectes. Et l’occitan enseigné en Provence est naturellement le provençal.

Nous retrouvons dans la proposition de loi de Monsieur Reynès tous les ingrédients du discours propagandiste habituel de certaines organisations pseudoprovençalistes. Elles font du « sécessionnisme linguistique » contre notre grande langue occitane : mélange des notions, mauvaise foi et prétention de s’exprimer au nom du peuple. En réalité, les promoteurs sérieux du provençal sur le terrain rejettent ces idées de division et de sectarisme ; et la majorité des associations provençales soutiennent l’unité pluricentrique de l’occitan dans laquelle le provençal a toute sa place.

L’Assemblée Nationale Occitane (ANÒC) s’insurge contre tout cet assortiment d’arguments ineptes. Nous affirmons le caractère unitaire de la langue d’oc (ou occitan), dont le provençal fait dignement partie.

Nous croyons que l’urgence actuelle, pour défendre réellement le provençal, est de demander un statut de protection officielle pour l’ensemble de la langue occitane — en incluant le provençal — à l’occasion de la révision de la constitution.